PAYS DU GIER


 

HISTOIRE DES SABOTIERS

  

 

 

Le métier de sabotier : un métier présent dans toute la France depuis plus d'un millénaire.

Les historiens de notre vallée ne se sont guère arrêtés sur ce métier pourtant indispensable à la vie de tous les jours. Seul, Bernard PLESSY dans son livre "La vie quotidienne en Forez avant 1914", Ed. Hachette 1981, l'évoque, et encore, succinctement : " A partir du XXème, les charbonniers et les sabotiers désertent la forêt. Les sabotiers choisissent leurs fayards sur pied et les font descendre à la ville comme le père Bonnel de St Paul". Le fayard : c'est le hêtre, dans notre Pays du Gier. On utilise toujours ce terme quand on commande du bois de chauffage : du chêne et du fayard !

Que s'est-il donc passé avant le XXe siècle. On peut s'en douter. Quel village n'a pas, au moins, un sabotier à son service. Parfois, même, le sabotier devient itinérant, allant de village en village, de ferme en ferme. Il vit tout l'été dans une forêt voisine dans une hutte faite de branchages, si possible près d'une rivière (le Gier, le Dorlay, le Couzon, dans le massif du Pilat). Il n'est pas seul : d'autres sabotiers, des bûcherons et des charbonniers partagent le même bois. Le voisinage n'est pas de tout repos : jalousie, concurrence et, parfois, l'alcool sont à l'origine de bien des bagarres. Et pourtant, cette vie précaire, inconfortable, sans hygiène ou presque, permettent d'avoir une vie sociale. Les conditions sont difficiles et le travail ne paye guère. Heureusement, pour chaque paire de pieds, il faut plusieurs paires de sabot, chaque année. Finalement, le travail ne manque pas.

On fabrique les sabots en famille : le mari abat les arbres à la hache ou à la scie, coupe des bûches aux bonnes dimensions, qui deviennent des ébauches de sabots pleins en quelques coups de hache à bucher et de paroir. C'est, ensuite, au tour de l'épouse et des enfants de vider la masse de bois, de la polir à l'intérieur comme à l'extérieur pour éliminer les traces laissés par les outils de forme. Le mari termine d'un coup de scie et d'herminette pour faire le talon et grave quelques décorations sur le coup de pied. Dans la journée, qui n'est pas de 8 heures, la famille arrive à fabriquer, au plus, 5 paires de sabots.
Le bois utilisé dans notre Pays du Gier est avant tout le hêtre : nos forêts en sont riches. D'autres bois tendres, donc faciles à travailler, peuvent servir à fabriquer des sabots : le bouleau, l'orme, l'aulne, le peuplier. Pour les sabots de fête, on préfère le noyer. Bien sûr, le prix et l'usure vont varier suivant la nature du bois employé.

En l'absence de données précises, il est difficile d'en savoir plus. Le métier se transmettait-il de père en fils ? Que faisaient les sabotiers en hiver ? Avaient-ils une maison dans laquelle il revenait à la fin de la belle saison ? Il faudrait, pour cela, consulter des archives : registres paroissiaux, puis d'état civil, par exemple. Peut-être, aurons-nous le temps d'étudier de plus près cette question. S'il y a des volontaires, nous acceptons toute aide !

Pour combler cette méconnaissance, nous vous proposons de décliner le mot sabot que l'on retrouve soit isolément avec une signification particulière, soit dans des expressions.
 

Quelques mots

Baignoire sabot : baignoire courte où l'on se lave assis.

Plat sabot : plat à four ovale.

Sabot d'enrayage, de projectile (armurerie).

Sabot d'enrayage (chemin de fer) : dispositif pour ralentir ou arrêter un véhicule en roue libre.

Sabot (cirque) : caisson mobile utilisé pour le transport des fauves.

Sabot (costume) : coiffe ; manche.

Sabot (jeux) : boîte où sont placées les cartes à jouer.

Sabot (forage) : extrémité inférieure d' une colonne de tubage.

Sabot (ébénisterie) : ornement métallique (bronze) placé au bas des pieds d'une table, d'une commode…

Sabot (charpenterie) : pièce métallique ou en bois pouvant entourer un élément de charpente, un poteau… Même signification en maçonnerie pour un pilotis, un pieu…

Sabot (oisellerie) : petite niche placée dans les volières pour servir de refuge à certains oiseaux.

Sabot (musique) : petit crochet qui sert à raccourcir la corde d'une harpe pour l'élever d'un demi-ton.

Sabot : toupie que font tourner les enfants en la fouettant avec une lanière.

Sabot : instrument, outil qui ne vaut rien.

Sabot du pape, sabot de Vénus : plantes.

Sabot de cheval, des ruminants...

Sabot de frein qui appuie sur la jante.

Sabot de Denver : dispositif qui empêche un véhicule de rouler.

Sabotage : voir ci-dessous "saboter". A l'origine, action de taper du pied chaussé de sabot pour couvrir le discours d'un orateur dont on ne partage pas les idées. Fin XIXe siècle, action des ouvriers qui jetaient leurs sabots dans les machines pour les empêcher de fonctionner (grèves).

Sabotage : opération consistant à entailler les traverses ou les longrines de chemin de fer pour y fixer les pièces métalliques constituant les éléments de la voie.

Saboter : faire mal son travail ; gâcher son travail ou celui des autres ; détruire pour gêner.

Saboterie : atelier du sabotier.

Saboteur, euse : personne qui fait mal son travail…

Saboteur, euse : ouvrier qui effectue le sabotage des traverses

Sabotier, ère : artisan qui fabrique ou commerçant qui vend le sabot.

Sabotière : danse rythmée par le martèlement des sabots.

Sabottée : mesure approximative du pas (Berry).

 

Quelques expressions

Avoir les deux pieds dans le même sabot : être embarrassé, passif, sans initiative ; incapable d'agir.

Voir venir quelqu'un avec ses gros sabots : voir où veut en venir quelqu'un devant ses intentions mal cachées.

Ne pas se trouver sous le sabot d'un cheval : se dit à propos d'une chose rare, difficile à trouver.

Prendre ses cliques et ses claques, du mot ancien "clique", sabot : partir.

Mêler ses sabots : coucher avec une femme.

Il n'y a pas de sabot sous le lit qui ne trouve son pareil, équivalent de : on trouve toujours chaussure à son pied.

Gelé comme une patate dans un sabot : transi, glacé.

Il est venu à Paris en sabots : se dit d'une personne qui, partie de rien, est devenue très riche.

Le sabot dort : la toupie tourne si vite sans changer de place qu'elle paraît immobile.

Dormir comme un sabot : dormir profondément.

Il a du foin dans les sabots : se dit d'un paysan riche.

Travailler comme un sabot : travailler très mal.

L'amour, c'est pisser dans un sabot et le jeter dehors (horrible ! sans commentaires).

Se mouver les sabots : se remuer.

 

 

Nous n'avons pas l'intention d'être exhaustifs. N'hésitez pas à nous donner d'autres exemples.

 


   

                                                                                       Crochet de tablier de sabotier

 

 

FIN