PAYS DU GIER
HISTOIRE DES FERBLANTIERS
Comme pour la plupart des métiers des métaux, le métier de ferblantier a retenu l'attention des historiens locaux ou, même, nationaux dans les villes de notre Pays du Gier. Nous disposons, donc, de quelques articles mettant en évidence cette activité dès le début du deuxième millénaire de notre ère. Par contre, il nous est apparu très difficile d'isoler ce métier, tant au niveau du dossier "Métiers d'antan" que de celui des "Outils d'antan". Au fil du temps, suivant les régions, suivant le métal travaillé, d'autres métiers ont fait preuve d'un savoir-faire tout à fait comparable : lanternier, dinandier, chaudronnier, étameur, rétameur, orfèvre, sans compter quelques dénominations qui précisent une spécialité comme ferblantier poliste qui fabrique cafetières et ustensiles de ménage, ferblantier lampiste qui fabrique des lampes à huile…Tous ces métiers ont sans doute existé dans notre vallée, comme dans beaucoup d'autres, avec, toutefois, une prédominance des ferblantiers fabricants de quincaillerie en fer blanc plutôt qu'en cuivre : casseroles, poêles, couvercles, récipients divers pour la cuisine, l'éclairage, lanternes, arrosoirs…
"Vers 1100, on vit apparaître ces petits ateliers familiaux dans lesquels les artisans travaillaient sans contrainte, sans contrôle et sans règlements compliqués. De très bonne heure, St Etienne et ses environs immédiats attirèrent les meilleurs ouvriers qui produisaient les ustensiles que l'on désigne encore aujourd'hui sous le nom de quincaillerie." 1
Beaucoup plus tard, au XIXe siècle, on retrouve ce genre de production. On ne parle plus d'artisanat : la Révolution industrielle a commencé.
"La commune d'Izieux se distingue par une industrie tout à fait spéciale : ce n'est que dans cette localité que sont fabriquées les poêles à frire. L'usine unique où l'on se livre à cette bruyante fabrication fut établie par un chef d'atelier venu de Sedan, ville rivale d'Izieux pour la confection de ce produit. Aujourd'hui, plus de 60 ouvriers travaillent dans la fabrique qui ne consomme pas moins de cent milliers de fer en barre, sans pouvoir suffire aux innombrables demandes qui lui sont faites. De nombreux marteaux mis en mouvement par le ruisseau appelé le Janon préparent nuit et jour le fer qui doit recevoir ensuite la forme des poêles à frire. Depuis quelques années, on a joint à cette fabrication celle des cuillers à pots et des couvercles de marmites." 2
Confirmation nous est donnée par un autre historien local.
"En 1850, une usine occupait à Izieux 60 ouvriers pour la fabrication des poêles à frire." 3
Dans cette même ville d'Izieux, aujourd'hui rattachée à Saint Chamond, on trouve ce que l'on appelle aujourd'hui des sous-traitants des ferblantiers.
"Le Gier est aussi utilisé par les multiples activités artisanales nécessaires à la vie d'un bourg isolé. Il active une molière, c'est-à-dire un aiguisage pour les outils de l'agriculture, et la statistique de 1832 dénombre 3 aiguiseries dont deux à Izieux. Elles permettent de dégrossir et d'émoudre le métal à l'aide de meules de grès, de polir les objets de quincaillerie, de donner du tranchant aux couteaux." 4
Mais la ville qui va développer le plus cette activité est Saint Martin-la-Plaine.
"Saint Martin voyait croître et se différencier sa production artisanale : chaînes, boulons, serrures, ferrures pour le bâtiment, pièces pour la poêlerie, la bourrellerie et la ferblanterie." 5
L'activité de Saint-Martin-la-Plaine est évoquée avec de nombreux détails par C. Chomienne, dans un livre paru en 1912. Quelques remarques semblent être toujours d'actualités sur le plan économique.
"C'est à Saint-Martin-la –Plaine et à Saint-Genis-Terrenoire que cette industrie [la quincaillerie] s'est installée à une date assez difficile à préciser. Dans les registres de cette première commune, il est constaté, en 1630, la présence de forgeurs. A cette époque, le bois seul était employé pour le chauffage du fer ; ce n'est que plus tard, au moment de la découverte de la houille à Rive-de-Gier, que le nombre de ces ouvriers augmenta considérablement. Ils se trouvèrent alors en possession d'un combustible permettant le forgeage et le soudage des pièces.
Vers 1700, la réputation de ces habiles ouvriers s'étendait un peu partout ; aussi faisaient-ils une concurrence sérieuse à leurs confrères de Saint Etienne.
Les fers étaient livrés par les nombreuses fenderies existant à Saint-Julien-en-Jarez, à Saint-Paul-en-Jarez et à Saint-Genis-Terrenoire, où le fer en barres était divisé, dans le sens de la longueur, en verges ou baguettes…
Ces forgerons, appelés maréchaux, fabriquaient les ferrures pour le bâtiment, la poêlerie, la ferblanterie et la bourrellerie. Ces articles étaient transportés à dos de mulets à Saint Etienne et à Lyon. Ils étaient ensuite expédiés par le Rhône dans tout le Midi de la France et par la Saône dans la Bourgogne et jusqu'à Paris… La création du chemin de fer de Saint-Etienne à Lyon, en 1833, ouvrit de nouveaux débouchés, et l'industrie de Saint-Martin-la-Plaine devint plus importante et plus prospère.
… [Dans la deuxième moitié du XIXe siècle], quelques usines mécaniques se sont organisées ces dernières années pour la production de gros articles de ferronnerie nécessitant un outillage puissant. Mais c'est encore l'ouvrier forgeur travaillant chez lui avec sa famille qui produit à meilleur marché les pentures, les chaînes, les autres petites pièces pour le harnachement et les ustensiles de ménage.
… cette industrie verrait son exportation s'accroître notablement si le privilège de la nation la plus favorisée lui était accordé dans les pays du Levant, car elle a à soutenir la concurrence allemande favorisée par le bas prix des matières premières et des primes à l'exportation." 6
Suit une énumération des entreprises en place à Saint Martin-la-Plaine créées durant le XIXe siècle. La plupart fabrique des ferrures pour bâtiment, charrons, bourreliers, des chaînes, de la quincaillerie… Certaines produisent également de la ferblanterie, sans que soit précisée la nature de ces objets : Ets Félix Cadier, créés en 1830 ; Ets Guérin frères, créés en 1839 ; Ets Richard père et fils, créés en 1873.
Il est bien difficile de se faire une idée précise sur, d'une part, la production de ces forgeurs, d'autre part les moyens utilisés. Le mot "forgeur" fait penser davantage à un martelage à chaud, contrairement à ce que faisait le ferblantier. Dans les quelques livres que nous avons consultés, nous trouvons bien le mot "ferblanterie", jamais celui de "ferblantier".
Alors !
Une fois de plus, les registres paroissiaux ou d'état civil nous donnerons, peut-être, la solution … lorsque nous aurons le temps de les étudier.
Lanterne à bougie Lanterne à huile |
Cuit-oeuf |
Bibliographie
c 1 J. Combe, Saint Martin la Plaine, Editions Dumas, St Etienne, 1960.
2 G. Touchard-Lafosse, La Loire, Les Editions du Bastion, 2002 (réédition).
3 J. Lapourré, Histoire de la ville d'Izieux, Imp. De la Loire Républicaine 1921, Réédition
1990 par les Amis du Vieux Saint Chamond Reboul Imprimerie St Etienne.
4 Louis Challet, Le Jarez d'hier et d'aujourd'hui : Au temps des eaux vives du Gier, Amis du
Vieux St Chamond n° 21 Reboul imprimerie, 1993.
5 G.Gardes, Grande Encyclopédie du Forez et des Communes de la Loire, Editions Horvath,
6 Claudius Chomienne, Histoire de la ville de Rive-de-Gier, Edition Le Livre d'histoire-Lorisse,
Paris 2003 (réédition).