SANTÉ ET HYGIÈNE

 

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GYNÉCOLOGIE

 

 

 

 

Si les instruments présentés dans le cadre de la "Médecine et des soins généraux" ne posent pas de problème majeur quant à leur nom et leur utilité, il n'en va pas de même pour ceux que nous allons vous proposer dans les articles suivants. Nous avons consulté de nombreux catalogues. Pinces et ciseaux y sont dessinés, mais la distinction est loin d'être évidente dans certains cas, et ce, d'autant que l'on n'en a pas l'expérience. Nous réitérons notre demande auprès des professionnels qui visiteront notre site : n'hésitez pas à nous donner des conseils, à corriger ce qui vous semble erroné. Nous présenterons ce paragraphe pour tous les chapitres où nous avons quelques incertitudes.

L'hygiène féminine intime a, de tout temps, fait l'objet de soins attentifs tant de la part des patientes que des praticiens. Les "irrigateurs" existent depuis l'antiquité, sous forme de seringues. Au XIXe siècle sont apparus de nouveaux modèles. Nous allons les découvrir.

Les plus anciens sont, donc, des seringues en étain dont la canule, droite, mais surtout courbée, est terminée par une ampoule percée de 10 trous et plus, réalisant une véritable douche.

 

   

 

     
 

                                             Seringue "irrigateur"
                                             Loire
                                             L. 40   réservoir 13 x 3   canule 21 (18 trous)

 

 

Le joint entre le corps de la seringue et le piston est réalisé avec de la filasse. Le liquide injecté peut avoir une action antiseptique (on ne parle pas encore d'antibiotique qui n'arrive qu'en 1928, avec Alexander Fleming), spermicide et "salvatrice" :

Antiseptique, pour lutter contre une infection.

Spermicide, comme moyen de contraception.

Salvatrice : si l'accouchement se passe mal, si le bébé risque de mourir, la matrone va baptiser l'enfant in situ pour lui permettre d'arriver au paradis, en enfant de Dieu.                              

 

   

 

     

 

     
 

                                                 Seringue "irrigateur"
                                                 Loire                   …EDERIC
                                                                                 DOLL
                                                                                     …. AR

                                                 L 46   réservoir 17 x 5  canule 17 (13 trous)

 

 

Le maître-potier d'étain fait partie d'une dynastie de Colmar : Jean-Frédéric Doll (1749 - 1830), potier d'étain, père de Jean-Frédéric (1786 – 1839), potier d'étain, père de Charles Frédéric (1813 – 1900), fondeur d'étain, toujours à Colmar, dans le Haut-Rhin. Ces seringues étaient effectuées par des potiers. On peut donc penser que le modèle présenté est le fait de l'un des deux Jean-Frédéric et date de la fin du XVIIIe siècle ou du début du XIXe.

 

   

 

     
 

                                              Seringue "irrigateur"
                                              Loire
                                              L 35   réservoir 15 x 4   canule 19 (13 trous)

 

 

La canule est droite. On peut penser que cette seringue était utilisée par une tierce personne alors que les seringues à canule coudée étaient manipulées par la patiente elle-même. Nous revoyons cette caractéristique technique pour les seringues à clystère.

Au XIXe siècle, la seringue a tendance à disparaître. Il faut dire que le plomb contenu dans l'étain était source d'intoxications souvent mortelles si le potier ne respectait pas les ordonnances royales.

Deux types d'irrigateurs apparaissent : le clysopompe et l'irrigateur du Dr Eguisier.

Le clysopompe fait suite à la seringue en étain. L'instrument est placé dans une cuve contenant la solution à injecter. Le pompage se fait soit avec un système de piston monté sur ressort, soit à l'aide d'une poire en caoutchouc avec bille anti-retour.

 

   
        Clysopompe à piston
  Loire                 VERITABLE LE PARFAIT
                 
DEPOSE INJECTEUR PERFECTIONNE
 
h 14


 

   
 

                                   Clysopompe
                                   Loire
                                   h 16

 

 

 

L'irrigateur du Dr Eguisier est breveté pour la première fois en 1842. Il est proposé à la vente jusque dans les années 1920. Constitué d'un réservoir cylindrique, il est muni d'un piston dont le centre de la base est muni d'une soupape. Le piston est remonté grâce à la clef à ressort : le liquide passe sous la base du piston. Lorsque celle-ci est en bout de course, il suffit d'ouvrir le robinet pour que le piston descende sous l'effet du ressort qui se détend. Le jet doit être assez violent, à en juger par la force du ressort. Sur des muqueuses fragilisées par une infection, il fallait sûrement prendre quelques précautions…

 

   

 

 
 

                                  Irrigateur du Dr Eguisier
                                  Rhône           L 2 M
                                  h tot. 23   réservoir 18 x 7

 

 

Les lettres "L M" indiquent, a priori, le nom du fabricant. A priori, car sur le support de la clef, on peut lire :

BUCCHETTI FRERES
POTIERS D'ETAIN
VILLEFRANCHE

Que signifie "Marque de fabrique" sous L 2 M ?

Le chiffre "2" indique la capacité du réservoir : 0,5 l. C'est le plus fréquent. Les volumes variaient de 0,375 l pour le numéro 1 à 4 l pour le numéro 6. Ils étaient livrés avec un tuyau de 80 cm et une canule en os.

 

 

   

 

 

 

 
 

                                                     Irrigateur du Dr Eguisier
                                                     Loire           N° (L.F.) 2
                                                     h tot. 23   réservoir 18 x 7

 

 

 

Les modèles ci-dessus sont en étain "brut". Il en existe également en étain émaillé, chromé ou nickelé, laqué façon marbre, ou blanc ou brun.

 

     

 

   










 










 
 

                                                     Irrigateur du Dr Eguisier
                                                     Loire           N°  (G &H)  2
                                                     h tot. 23   réservoir 18 x 7

 

 

La fermeture du coffret porte le nom du fabricant du coffret :" F & CIE  PARIS". Sur le réservoir, on peut également lire "EXPOSITION BORDEAUX 1866" et "MENTION HONORABLE"

 

Reste une inconnue : le nom de l'inventeur. Un médecin gynécologue-obstétricien, le Dr Maurice Eguisier (1813 – 1851) ou un bandagiste du nom de Libault !?

A noter, enfin, que, si cet irrigateur a été conçu pour les affections vaginales et utérines, il a pu servir pour toute autre injection : anale, vésicale, et même buccale !

Pour en savoir beaucoup plus, voir l'article de Cécile Raynal.

 

Pour les injections vaginales, il pouvait être complété par un embout en faïence blanche.

 

     
 

                                 Embout pour irrigation vaginale
                                 Isère
                                 10 x 6   canule 6 x 3

 

 

 

Plus récent, moins violente, peut-être moins efficace, la douche à injection utilise la gravimétrie. Un récipient en tôle émaillée est placé à une certaine hauteur. A sa base sort un tuyau muni d'un robinet, et le tour est joué. Il sert pour les injections vaginales, anales. Il est vendu avec les canules correspondantes.

  

   

 

 

 

 

 

 
                                                  Douche à injection
                                                Rhône
                                                Récipient h 22   canule vaginale 14,5   anale 7,5
 

 

 

En 1910, la Manufacture d'Armes et de Cycles de Saint Etienne vendait pour cette douche un tuyau de 2,25 m.

 

Enfin, dans les années 1930, fut commercialisée la douche GYR, une grosse poire en caoutchouc prolongée par une canule dans laquelle est fixée une ailette métallique qui tourne lorsque l'on appuie sur la poire.

 

     

                                                                                      "Le seul qui tourne"

 

   

 

     

 

     
 

                                 Douche GYR à jet "réellement" rotatif
                                 Rhône
                                 h 23   canule 9,5   diam. poire 8

 

 

 

Nous avons vu jusqu'à présent des instruments que pouvaient utiliser les patientes sans l'aide de quiconque. Seuls les médicaments devaient être prescrits par le médecin.

Nous allons voir maintenant quelques instruments manipulés par le praticien, en particulier lors d'interventions chirurgicales. Ils ne sont pas très vieux dans leur fabrication, mais leur conception date du XIXe siècle. Certains, au moins dans leur principe, remontent, même, à l'époque romaine. La plupart d'entre eux sont désignés par un nom d'instrument (pince, ciseau, sonde…) suivi du nom de leur inventeur. Nous nous efforcerons de situer dans le temps ces médecins dont les découvertes ont permis d'améliorer les techniques de diagnostic et de soin.

 

Le premier instrument utilisé dans tout examen gynécologique est le spéculum. Introduit dans le vagin, il permet d'observer le col de l'utérus, de réaliser des prélèvements pour examen bactériologique ou cytologique (frottis vaginal), de rechercher des cellules anormales par un test in situ. Depuis son invention, sans doute avant l'époque romaine, les formes ont évolué : tronconique, tripode, à 2 ou 3 valves ; les matériaux, également : bois, étain, verre, acier et, aujourd'hui, matière plastique, à usage unique.

Paradoxalement, le premier modèle, le spéculum bivalve de Cusco, est celui qui est encore le plus utilisé des spéculums métalliques. Paradoxalement, car il semble avoir été conçu dans les années 1850 (à confirmer, toutefois). D'abord en maillechort, il a été réalisé, plus récemment, en acier chromé et en matière plastique.

 

   
                                               Spéculum de Cusco
                                             Isère
                                             L 12   l valve 3,8
 

 

 

Présenté dans le catalogue de 1854 de CHARRIERE, le spéculum suivant est constitué de 3 valves et d'un mandrin en ébène, à section ovale.

 

     

 

   
                                           Spéculums trivalves
                                         Loire
                                         1 L 19  MATHIEU A PARIS
                                         2 L 19  CHARRIERE
 

 

 

Datant des années 1860, le spéculum bivalve de type "Ricord" est muni de poignées en ébonite et de graduations déterminant le niveau d'ouverture.

 

     

                        

   
 

                           Spéculums type Ricord* à 2 valves
                            Loire
                            1 L 24  Ø 4  graduations 1 à 4  CHARRIERE
                            2 L 24  Ø 4,5  graduations 1 à 7

 

 

* Philippe Ricord (1800 – 1889), français, né à Baltimore.

 

Le catalogue Delamotte "1789 – 1906" (!) présente le spéculum à glace de Fergusson, en gomme noire à l'extérieur, à miroir à l'intérieur pour réfléchir un maximum de lumière.

 

     

 

   
 

                                  Spéculum à glace de Fergusson
                                  Loire
                                  L 15  Ø 3

 

 

 

Outre l'observation, les prélèvements, le spéculum permet d'introduire dans l'utérus d'autres instruments :

- L'hystéromètre permet de mesurer, éventuellement de remettre en place l'utérus. L'intérêt de cette mesure est diagnostic, dans une suspicion de fibrome, thérapeutique pour un curetage ou une pose de stérilet.

 

 

 
 

                                   Hystéromètre (de Sims ?)*
                                   Isère
                                   L 30   poignée 6,5   graduations 5 …. 10 …. 15 …..

 

 

* James Marion Sims (1813 – 1883), né aux Etats-Unis, en Caroline du Sud.

 

- la sonde à double courant de Doléris, utilisée aussi en obstétrique, permet d'injecter dans l'utérus un liquide médicamenteux par un premier conduit et de le retirer par un deuxième, parallèle. Elle est utile en cas d'infection, d'hémorragie, à l'issue d'un curetage...

 

   
 

      Sonde à double courant de Doléris*
      Loire
      L 34

 

* Jacques-Amédée Doléris (1852 – 1938), né en France, dans les Pyrénées orientales.

 

- la pince de Cicéron, pour pose – dépose de stérilet

 

   
 

   Pince de Cicéron*
   Loire
   L 46

 

* Pas facile d'en savoir plus sur ce nom : on se retrouve rapidement et logiquement au temps des Romains ! A suivre…

 

- la pince de Museux, utilisée dans l'hystérectomie (ablation de l'utérus)…

 

   
 

                   Pince de Museux*
                   Loire     LANDANGER
                   L23

 

* Nicolas Museux (1714 – 1783), né en France, à Traveray, dans l'Aisne. Il était chirurgien et barbier-perruquier.

 

- la pince à biopsie gynécologique de Jean Louis Faure

 

   
                         Pince de Jean Louis Faure*
                       Loire
                       L 23   diam. internes 1,4 et 0,9
 

 

* Jean Louis Faure (1863 – 1944), né à Ste Foy la Grande, en Gironde.

 

- la pince de Pozzi Palmer, "pour une prise sûre et ferme du col" de l'utérus, dans l'hystérectomie.

 

   
 

                       Pince de Pozzi-Palmer*
                       Loire
                       L 26

 

 

* Samuel Pozzi (1846 – 1918), né en France, à Bergerac, en Dordogne.

 

- l'écraseur linéaire de Chassaignac, utilisé pour l'ablation des polypes utérins par écrasement du pédoncule, les tumeurs... On le retrouve chez l'obstétricien pour l'extraction du fœtus mort, chez le chirurgien pour les amputations et chez … le vétérinaire pour la castration des moutons. Il est sensé limiter les effusions de sang.

 

   

 

       
 

                                  Ecraseurs linéaires de Chassaignac*
                                  Loire
                                  1 L 38    MATHIEU A PARIS
                                  2 L 25

 

 

Par un basculement de la poignée vers le bas, à droite, puis à gauche, on réduit la longueur de la chaîne grâce à un système de crémaillère.

* Edouard Chassaignac (1804 – 1879), né à Nantes.

 

Dans le cadre de l'hystérectomie, peuvent être également utilisés des écarteurs comme les valves de Segond.

 

   
 

                                       Valves de Segond*
                                       Meuse             WAHL
                                                           A NANCY
                                       L 24   valve 6,5 x 5,5

 

La maison Wahl a été créée en 1850, spécialisée dans la fabrication d'instruments de chirurgie, d'appareils de prothèse et d'orthopédie.

*Paul Segond (1851 – 1912), né à Paris

 

Autre valve, celle de Richelot.

 

   
 

                                          Valve de Richelot*
                                           Loire
                                           L 30  valve 18 x 5

 

 

*Louis-Gustave Richelot (1844 – 1924), né à Paris.

 

Classées dans les "Instruments pour les maladies des femmes" dans le catalogue de Charrière de 1854, ces deux lames plates de M. Jobert servent à "déprimer les parois latérales du vagin".

 

   




 
 

                                            Lames plates de Jobert*
                                            Loire     MATHIEU
                                            L 22  lames 13 x 2

 

 

*Antoine-Joseph Jobert (1799 – 1867), né à Matignon (Bretagne).

 

Dans le cadre de ces "Instruments pour les maladies des femmes", on peut évoquer également le pessaire. Cet objet est placé à l'intérieur du vagin pour permettre de maintenir en place l'utérus dans le cadre d'un prolapsus utérin plus connu du grand public sous le nom de "descente d'organe". Le catalogue Charriere de 1854 en présente une douzaine de formes différentes. Celui de Mathieu de 1905 indique les matériaux utilisés : gomme, ébonite, étain, aluminium, voire plomb au début de notre ère.

 

   
                                     Pessaires de Sims ou Hodge*
                                   Loire
                                   1  7 x 4,5     2  8,5 x 5    3  8 x 5
 

                             

* Hugh Lenox Hodge (1796 – 1873), né à Philadelphie.

Deux créateurs pour ces pessaires, peut-être en relation avec le matériau utilisé. On les retrouve dans le catalogue Lépine de 1882.

 

 

     
 

                                            Pessaires en anneau
                                             Loire
                                             Ø entre 6,3 et 7,5

 

 

Ces pessaires en anneau sont constitués d'un ressort entouré de caoutchouc. Ils sont dus à Amédée Dumontpallier (1826 – 1899), à droite, et Alfred Auvard (1855 – 1940), à gauche.

 

Dernier instrument, une seringue avec canule (en quel matériau ?). Il s'agit, sans doute (à confirmer) d'un hystérographe. Cette seringue permet d'injecter un liquide opaque aux rayons X dans le cadre d'une hystérographie.

 

   
                       Hystérographe
                     Var
                     Seringue L 17,5   canule L 14

 

Quelques instruments restent encore à identifier. Nous les rajouterons dès que possible.

Dans le prochain chapitre, nous verrons des instruments d'obstétrique.

 

 

                                                                                                                                                                             A suivre…

 

 

A.R.C.O.M.A.  NOS INSTRUMENTS ANCIENS POUR LA SANTÉ ET L'HYGIÈNE

GYNÉCOLOGIE