ARPENTEUR – GÉOMÈTRE
Comme nous l'avons signalé dans notre page d'accueil, nous ne voyons dans ces articles que les outils dont nous disposons. On ne peut, toutefois, s'empêcher de citer les outils les plus anciens utilisés par les arpenteurs : cordes, cordeaux, ficelles, bâtons ou cannes pour mesurer des distances, cordes à 3 nœuds distants respectivement de 3, 4 et 5 pieds pour tracer des angles droits, cordes à 13 nœuds pour tracer des figures géométriques, archipendule ou niveau à perpendicule, équerre à angle droit et fil à plomb pour niveler. Ces outils utilisés par les Egyptiens le sont encore au Moyen-Âge. On peut citer, également, le quadrant géométrique, le chorobate ou niveau à eau, l'astrolabe, la dioptre grecque, la groma romaine, la mire, le piquet…
Matériel de bureau
Le stylet et la tablette de cire étaient indispensables pour noter les relevés. Avec l'utilisation du parchemin et, bien plus tard, du papier, l'arpenteur s'est doté d'un ensemble de crayons, de compas lui permettant également de dresser des plans à partir de ses mesures. Suivant l'utilisation qui en est faite, la boîte de compas est plus ou moins importante. Celle-ci, à deux étages, est de la fin du XIXe siècle :
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Cette boîte de compas très complète peut convenir à tous les métiers où le dessin précis est nécessaire : géomètre, architecte, dessinateur industriel… On peut y voir : compas balustre à brisures, à ressort ou à cheveu (petit cercle, grande précision), compas de réduction, compas à verge, tire-lignes, règle graduée, rapporteur, punaises. La question : à quel évènement fait référence l'inscription :
"1879 – 1884 SOUVENIR DE BLANQUEFORT"
L'arpenteur-géomètre est amené à réaliser des calculs. La calculatrice électronique n'existe pas encore. Il se sert d'une règle à calcul, pour les multiplications, les divisions, les calculs d'angle…
Règle à calcul (vers 1950) |
Les arpenteurs, comme les géographes, réalisent des dessins à l'échelle de leur convenance, mais toujours proportionnelle. Pour la détermination des distances sur ces cartes, on utilise un curvimètre, petit instrument muni d'une roulette qui, déplacée sur un plan, entraîne la rotation d'une aiguille au sein d'un cadran gradué, suivant plusieurs échelles.
Curvimètre 1/80000 1/40000 1/20000 1/100000 1/50000 1/25000 |
Mesure de distance
Avant de voir les instruments de mesure utilisés sur le terrain, il est bon de présenter l'instrument indispensable à tous les autres, le trépied :
Trépied Loire h 140 |
En bois, l'extrémité des pieds est protégée par un embout métallique. Des "appuis-pied" permettent d'enfoncer les pieds dans le sol.
Les premières mesures réalisées concernent des distances qui permettent de délimiter des propriétés. La corde est longtemps la référence avec les variations inévitables d'une ville à l'autre, comme pour toutes les mesures.
La chaîne d'arpenteur, constitué de maillons en métal de 20 cm reliés entre eux par des anneaux, aurait été inventée au XVIe siècle. Son utilisation est facile ; sa précision est douteuse, mais souvent suffisante.
Chaîne d'arpenteur |
L'instauration du système métrique met fin aux erreurs systématiques dont profitaient marchands et propriétaires terriens.
Le décamètre est, d'abord, en toile, sans protection, ou dans une coque protectrice en cuir rigide, avec manivelle rétractable pour le ré-enroulement.
Double décamètre en toile |
Décamètre |
Plus récent, le ruban d'arpenteur est en acier. Un point en laiton marque tous les 20 cm. Un chiffre en laiton indique le nombre de mètres.
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Ruban d'arpenteur LL |
Tous ces instruments permettent de déterminer des distances avec une précision correcte si le terrain est plat. Il n'en va pas de même si le terrain est en pente, avec des obstacles (bosses, rochers, cavités…). On réalise alors un autre type de mesure, dite horizontale. Parmi les instruments simples, on peut en citer quatre utilisés simultanément : la perche graduée (4 m x 5 cm), le niveau dit de maçon, le fil à plomb et le compas.
Niveau dit de maçon |
Fil à plomb |
Compas à secteur Loire L 94 secteur 53 |
Les progrès en optique réalisés dès le XVIè siècle sont à l'origine de l'invention d'instruments en médecine, en botanique, en chimie… et, bien sûr, en arpentage. Pour rester dans la mesure des distances, le tachéomètre autoréducteur, de type Sanguet (Joseph-Louis 1848 – 1921) est un instrument polyvalent que l'on retrouvera dans d'autres types de mesure. Par simple visée sur une mire, il permet de déterminer la distance horizontale entre deux points : c'est la fonction "stadimètre".
Tachéomètre autoréducteur, de type Sanguet |
Ce tachéomètre LEPETIT date de la fin du XIXè siècle ou du début du XXè. Le suivant, des établissements H. MORIN est plus récent. Il a appartenu au premier géomètre diplômé de Saint-Chamond.
Tachéomètre auto-réducteur, de type Sanguet |
Une remarque sur l'aspect de l'instrument : le premier a la couleur du laiton et du bronze dans sa partie supérieure. Cercle gradué et piètement sont protégés par une couche de peinture ou de vernis. Le second est entièrement protégé par cette même peinture, moins agréable à l'œil. Ces instruments étaient souvent soumis aux intempéries. Il fallait donc éviter toute oxydation et la formation de vert de gris. D'autres procédés ont été utilisés comme le noircissement du laiton par une solution ammoniacale de carbonate de cuivre.
Mesure de niveau
Nous disposons de 4 types d'instruments de mesure des niveaux : des niveaux à eau, un niveau à pinnules, des niveaux à lunettes et des niveaux à collimateur.
L'instrument le plus ancien et le plus simple pour mesurer un niveau est le niveau à eau, le chorobate de l'antiquité.
Niveau à eau |
Ce niveau est basé sur le principe des vases communicants : on utilise de l'eau légèrement colorée dont la surface se situe aux ¾ de la hauteur des récipients. Le regard de l'arpenteur suit une ligne affleurant les surfaces liquidiennes et se prolonge vers une mire à voyants mobiles.
La fixation sur le trépied est standardisée avec le "genou à coquilles".
Beaucoup plus récent (1961 : voir le "bon de préparation, ci-dessous), cet autre niveau à eau semble ne pas avoir besoin de mire. Les deux récipients sont reliés par un tuyau souple ; chacun d'eux est placé sur un point à étudier. L'eau se stabilise alors à un certain niveau qui est chiffré grâce aux graduations gravées sur le pointeau interne. Ce niveau était utilisé dans les établissements Creusot-Loire, à Saint-Chamond. Il nous a été donné lors de notre exposition de décembre 2016. Il mérite un bon nettoyage. Toute précision quant à son utilisation sera la bienvenue.
Niveau à eau |
De conception plus récente, les niveaux à pinnules sont plus précis que les anciens niveaux à eau. Le niveau de Chezy a été inventé à la fin du XVIIIè siècle. Le modèle que nous présentons est un niveau à pente de Chezy, avec niveau à bulle d'air pour vérifier l'horizontalité de l'instrument.
Niveau de pente à pinnules de Chézy |
Les annotations sont sur le couvercle. On peut y lire également :
BAUDEU
TOULOUSE
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Pinnules constituées de 2 fils perpendiculaires |
La fixation sur le trépied utilise le principe du genou à coquilles.
Le niveau d'Egault est constitué essentiellement d'une lunette avec niveau à bulle. Certains modèles sont pourvus d'une boussole, d'autres d'un cercle gradué ou limbe.
Niveau d'Egault, avec boussole et niveau à bulle Doubs 1895 Lunette L 37 boussole Ø 10 pied 13 x 13 x 13 Niveau à bulle double L 18 |
Sans référence au fabricant, ce modèle date de 1895. Il est vraisemblablement d'origine anglaise, de type Troughton & Simms. Il permet de chiffrer des différences de niveaux, en terrain plat.
Cet autre niveau est de la même époque, mais dispose d'un cercle gradué qui "permet de voir les directions (?)"
Niveau d'Egault, avec limbe et niveau à bulle Doubs BOUCART 35 Quai de l'Horloge Paris Lunette L 39 limbe Ø 12 pied 18 x 18 x 18 Niveau à bulle L 17 |
Nous mettons ici un autre petit instrument de poche utilisé, notamment, dans l'armée, par le génie, le niveau d'Abney. Il sert à mesurer des angles d'élévation ou de dépression, des pentes ou à déterminer des hauteurs. Il est composé essentiellement d'un tube de visée, d'un niveau à bulle et d'un demi-cercle (rapporteur) gradué.
Niveau d'Abney Pas-de-Calais STANLEY LONDON L 13,5 / 15,7 "rapporteur" L 7,5 |
Niveau à bulle graduations +/- 90° vernier 10' |
Nous avons placé là ce niveau car, comme les précédents, il comporte un tube de visée et un niveau à bulle. Son utilisation (à préciser) est, cependant, sensiblement différente. Un avis compétent sera le bienvenu.
Enfin, le niveau à collimateur, mis au point par le colonel C.-M. Goulier, dans le dernier quart du XIXè siècle, est un instrument beaucoup plus petit, donc facile à transporter. Sa portée est limitée à 30 m, avec une précision sur la mire de 1 cm. La visée se fait par deux fenêtres, à travers un collimateur (prisme) fixé sur un pendule et, donc, toujours horizontal.
Niveau à collimateur, type Goulier |
De plus grande taille et à plusieurs, fonctions, l'omnimètre est à la fois un niveau à collimateur et un pantomètre, pour mesurer les angles. Nous le retrouverons donc dans cette dernière catégorie d'instruments.
Omnimètre |
Sur la sacoche, on peut lire également :
63 075
ALES VEZENOBRE*
* A l'origine, nous avions lu "ALES VE 7 ENOBRE", ce qui, en soi, ne voulait rien dire ! Merci à H.P. qui nous a permis de corriger notre lecture. Vezenobre est une petite commune près d'Alès.
Dans les instruments de mesure des distances, nous avons présenté le tachéomètre autoréducteur. Nous le retrouvons dans cette deuxième catégorie pour mesurer des pentes, grâce à une échelle indiquant des pourcentages : une autre manière de déterminer des angles verticaux
Mesure d'angle
En dehors de la corde ou de l'archipendule, l'un des plus vieux instruments est l'équerre. Au fil des siècles, sa forme a évolué : cercle en bois avec pinnules, cylindre et, plus récemment, un octogone. Elle est utilisée pour créer une ligne droite perpendiculaire (angle droit) à une autre matérialisée par des piquets.
Equerre Seine-Maritime L 14,5 l 6 coffret 9,5 x 7,5 x 7,3 |
Le graphomètre à pinnules et à boussole permet de mesurer un angle qu'elle qu'en soit sa valeur, contrairement à l'équerre. Il est constitué d'une alidade à pinnules, d'un demi-cercle gradué de 0 à 180° et d'une boussole.
Graphomètre |
Graphomètre |
Le pantomètre, ou équerre tournante, ou goniomètre à pinnules, permet de mesurer des angles quelle qu'en soit la valeur. Il est en même temps équerre et graphomètre.
Pantomètre |
Le pantomètre est placé au sommet de l'angle que l'on veut mesurer. Un premier plan de visée est défini par le cylindre inférieur. Un deuxième est obtenu à partir du cylindre supérieur que l'on fait tourner avec la vis. Le vernier donne les minutes de l'angle.
On l'a vu dans la catégorie des instruments de mesure des niveaux, le niveau à collimateur de type Goulier peut aussi jouer le rôle du pantomètre :
Dans les instruments de mesure des distances, nous avons présenté le tachéomètre autoréducteur dans sa fonction stadimètre. Nous le retrouvons dans cette catégorie pour mesurer des pentes, grâce à une échelle indiquant des pourcentages : une autre manière de déterminer des angles verticaux et, donc, une fonction de clisimètre. En permettant de mesurer des angles horizontaux, il a une troisième fonction, celle du goniomètre.
On pourrait également citer, à nouveau, le niveau d'Abney pour la mesure des pentes et, donc, d'angle vertical.
Pour terminer cet article, le cercle d'alignement de Keuffel et Esser permet de mesurer :
- des niveaux entre deux points, en visant des mires graduées ;
- des angles dans un plan horizontal et, à partir de là, des distances trop importantes pour une mesure directe sur le terrain.
Un mode d'emploi détaillé, en américain, accompagne l'instrument qui date de 1924.
Cercle d'alignement Doubs KEUFFEL & ESSER Co N.V. Lunette L 26 Ø 2,5 cercle gradué Ø 11 niveau L 7 |
Le cercle comporte une graduation de 0 à 360°.
Ainsi s'achève cet article sur notre collection d'instruments d'arpenteur-géomètre. Nous sommes tout-à-fait conscients de notre manque de connaissance sur l'utilisation même d'un certain nombre de ces instruments. Nous pensons, cependant, que leur destination - mesure de distance, de niveau ou d'angle – est conforme à la réalité. Cette classification est d'ailleurs tout-à-fait théorique puisque certains de ces instruments peuvent se retrouver dans plusieurs catégories. Une fois de plus, nous faisons appel à toutes les personnes compétentes pour nous donner des informations complémentaires. Nous souhaiterions, en particulier, avoir des précisions sur les différentes pièces du tachéomètre.
FIN
A.R.C.O.M.A. NOS INSTRUMENTS D'ARPENTEUR-GEOMETRE