SANTÉ ET HYGIÈNE
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PÉDIATRIE
PUÉRICULTURE
Ce chapitre est consacré à l'alimentation du nourrisson. Depuis l'Antiquité, les médecins préconisent l'allaitement au sein. A Rome, dans les milieux aisés, ce n'est pas toujours la règle. Cette tâche maternelle est souvent confiée à des nourrices, souvent des esclaves ou des femmes libres qui proposent leur service, sur le marché, moyennant finance. Un biberon, en terre cuite ou en verre, contenant du lait animal ou une bouillie, remplace le sein à partir de 2 ans.
Au Moyen-Age, les nourrices jouent toujours un rôle important. Les nouveaux-nés des familles riches des villes sont confiés à des paysannes, dans les villages alentours. Notre Pays du Gier nourrit les bébés de Lyon : on en trouve la preuve dans les registres paroissiaux des XVIIe et XVIIIe siècle, à l'occasion de l'enterrement d'enfants de quelques mois. Il faut dire que les mesures d'hygiène ne sont guère respectées, souvent par ignorance, parfois par économie.
La méthode naturelle peut être remplacée, dans certaines circonstances, par des récipients adaptés à la mère ou au nourrisson. Ce sont les biberons et les tire-lait.
Les Biberons
Les premiers biberons découverts datent de l'Antiquité. Ce sont de petits récipients, en terre cuite, munis d'un bec verseur. Rien ne permet de savoir à partir de quel âge ils sont utilisés.
Au Moyen-Age, les biberons du peuple sont réalisés à partir de corne de vache ou de chèvre. Pour les classes plus aisées, ils sont en bois, en étain, en argent, avec un embout permettant la succion. Succion et non tétée, car cet embout est constitué d'une éponge ou d'un bout de drap enroulé, fixé par une ficelle : c'est le "drapeau". Un pis de vache séché peut être utilisé, mais il dégage rapidement une odeur qui coupe toute envie au bébé.
A partir de la Renaissance, ce sont des tasses ou des canards en faïence (voir Médecine et soins généraux 2) ou, dans les campagnes, des petits récipients en terre vernissée, en bois, en étain ou en fer blanc.
Biberon en étain (début XIXe) |
La tétine est entourée d'un drapeau maintenu par une ficelle. Si l'objet est séduisant sur le plan esthétique, il n'en va pas de même quant à l'hygiène. Le plomb contenu dans l'étain et un changement trop rare du drapeau sont source d'intoxications et d'infections, parfois mortelles.
Le salut arrive au XVIIIe siècle avec la réalisation de biberons en verre, plus faciles à nettoyer. Les formes sont nombreuses.
La forme "limande" est, au début, l'une des plus utilisées.
Biberon "limande" |
L'orifice supérieur permet le remplissage, la régulation du débit et le nettoyage. La tétine est toujours constituée par un drapeau.
Plus récent, avec un goulot plus important permettant d'adapter une tétine en caoutchouc (les premières datent des années 1830), "Le Parfait Nourricier" est nettoyé plus facilement.
Biberon à tétine caoutchouc Nièvre LE PARFAIT NOURRICIER L 17 l 9 |
Ces formes horizontales vont prendre de la hauteur et devenir des bouteilles, d'abord plates.
Biberon à tétine caoutchouc |
La forme s'arrondit avec la marque "Robert" devenue, dans le langage populaire, synonyme de sein de femme. En attendant de vous présenter un modèle en bon état, nous pensons qu'un "Robert" a sa place ici, même si le transporteur ne lui a pas accordé la délicatesse à laquelle son grand âge lui donnait droit…
Biberon Robert |
Le verre moulé permet de multiplier les annotations publicitaires. Sur ce seul biberon, on peut lire :
PARIS MARSEILLE
1873 1874
ROB ( ) ERT
EXPOSITION
HONNEUR
A
ROBERT
UNIVERSELLE
SOCIETE PROTECTRICE
ENFANCE
Ce biberon à tétine en caoutchouc va évoluer vers une… catastrophe mortelle pour de nombreux nourrissons, dans les années 1860 : le biberon à long tuyau. Plusieurs fabricants proposent cette nouveauté : Robert, bien sûr, mais aussi HP et, sans doute, bien d'autres.
Biberon à long tuyau et tétine Haute-Savoie BIBERON LACTOFERE A POMPE L 16 l 9 |
Très populaire, ce biberon permet à l'enfant de boire seul, sans que sa mère ait à tenir le biberon. Par contre, le tuyau en caoutchouc qui baigne dans le lait est difficile à nettoyer et donc propice au développement des bactéries. L'engouement du début fait place à un rejet populaire : c'est le "biberon qui tue", et à une interdiction de vente, en 1910.
C'est à cette même époque qu'apparaissent les laits animaux de substitution : d'ânesse, de brebis, de chèvre, de vache. De substitution, car les mères travaillent et n'ont plus assez de lait : la révolution industrielle est en route.
La forme des biberons va encore changer pour aboutir à celle que nous connaissons aujourd'hui : des petites bouteilles cylindriques terminées par un goulot sur lequel est adaptée la tétine en caoutchouc souple, par forçage ou vissage.
Biberon - bouteille Biberon - bouteille |
Biberon – bouteille |
CUILLEREES à SOUPE 1 à 14 |
GRAMMES 15 à 195 |
En même temps que ces biberons, la stérilisation fait son apparition.
Un nouveau pas est franchi avec l'invention du verre borosilicaté, en 1893, utilisé pour la fabrication d'ampoules. Dès 1915, cette découverte rentre dans les cuisines américaines avec toute une gamme de plats et de biberons en verre Pyrex, résistants à la chaleur. Ces nouveaux ustensiles de cuisine et de puériculture arriveront en France en 1922.
Le marquage publicitaire disparaît en grande partie. Il est remplacé par des graduations qui permettent de mesurer la quantité de lait.
Biberon en verre Pyrex (hexagonal ; 1er âge) Nièvre PYREX graduations 1 à 4 oz T.M. REG. U.S. PAT OFF 54N L 11 diam. 5,5 |
Biberon en verre Pyrex |
Viendront, ensuite, les biberons en polycarbonate, les tétines en silicone…
Dans cette énumération, il semble que les biberons n'aient eu cette forme cylindrique qu'à partir de la fin du XIXe siècle. Pourtant, dès la fin du XVIIIe siècle, on trouve des chauffe-biberon en étain munis d'une ou deux logettes rondes pouvant accueillir ce type de biberon, en aucun cas les limandes.
Chauffe-biberon en étain |
Cette présentation nous a permis de voir que les mesures d'hygiène étaient très souvent négligées par les mères, les nourrices et... les fabricants de biberon. Devant la mortalité infantile qui pouvait atteindre 30 % et plus, certains médecins ont décidé de créer une structure d'accueil pour le conseil des mères, l'incitation à l'allaitement au sein, la distribution de lait stérilisé et la surveillance des nouveaux-nés. En 1911, les docteurs Drevon et Thévenon créent à Saint-Chamond "La Goutte de Lait", avec le soutien des industriels locaux, en particulier la famille Gillet. En un an, le taux de mortalité tombe à 6,6 %. (Saint Chamond, par Gérard Chaperon, Actes graphiques 2010).
Les Tire-lait
Les tire-lait existent déjà dans l'Antiquité. Ils servent à provoquer la lactation. Ils évitent des douleurs à la mère en cas de crevasses sur le sein et la soulage au moment du sevrage. A cette époque, le lait humain est conseillé dans le traitement de certaines maladies comme la goutte, ou les conjonctivites…
Dans le premier modèle, le lait recueilli peut être transvasé dans un biberon.
Tire-lait, avec écouvillon et mandrin |
Le modèle suivant dispose de deux tubulures : l'une pour la mère, l'autre, terminée par une tétine (en mauvais état !) pour le bébé.
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Tire-lait |
Comme les tire-lait modernes électriques, ce dernier modèle, des années 1950, fait appel à un système de pompage (encore manuel).
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Tire-lait "pneumatique" |
Bout de sein – tire-lait ? |
Les tire-lait de la fin du XIXe siècle, début du XXe, étaient surtout destinés à une utilisation familiale (pour le bien de la mère et/ou de l'enfant). Aujourd'hui, ils sont, également, utilisés pour le recueil de lait qui est confié à des lactariums à l'intention d'autres enfants.
Dans le chapitre suivant, nous aborderons brièvement l'ophtalmologie.
A suivre…
A.R.C.O.M.A. NOS INSTRUMENTS ANCIENS POUR LA SANTÉ ET L'HYGIÈNE
PÉDIATRIE PUÉRICULTURE