LES MÉTIERS
DE LA PIERRE
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CANTONNIER PAVEUR
Dans l'histoire des Métiers de la Pierre, nous avons évoqué brièvement les métiers de cantonnier et de paveur. Il ne serait en être autrement dans notre vallée.
On peut tout de même se poser une question en voyant les réalisations des Romains qui, pour des raisons commerciales, créent un réseau de routes reliant, au moins, les capitales régionales de leur Empire. Il nous en reste quelques témoignages, notamment au départ de Rome, comme la via Appia. La construction de ces routes est très complexe. Le soubassement est constitué de 3 couches de différents matériaux sur un sol préalablement nivelé : cailloux, ciment, poteries et, enfin, dallage en pierres du pays traversé. Avec la chute de l'empire et les invasions des IIIe au Ve siècles, ces constructions disparaissent. Les routes redeviennent des chemins de terre jusqu'au XIXe siècle, à de quelques exceptions près.
Le premier à intervenir pour boucher les ornières provoquées par les chariots sont le cantonnier. Son travail consiste à désherber, à creuser des rigoles pour l'écoulement des eaux : les outils utilisés sont présentés chez l'Agriculteur 02.
Gouge à drain |
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Taille-pré |
Il doit, surtout, boucher les trous avec des graviers. Pour les obtenir, il fragmente des pierres à l'aide de massettes dont les manches sont longs et, relativement, flexibles, en coudrier ou en houx.
Massettes (présentation discutable sur un panneau d'exposition) |
Un modèle classique :
Massette de cantonnier |
Un modèle particulier :
Massette de cantonnier |
Outre le "V" sur la pointe, cette massette comporte, sur le côté, deux initiales, M et P, et un S fléché et couché. Une hypothèse sur la symbolique de cette ornementation : le S représente un serpent dont la vitesse est comparable à celle de cette massette qui vient frapper la pierre grâce à son manche souple…
À propos de ces massettes, un internaute nous fait cette remarque : " Marteau de cantonnier, mais pas que, s'il n'y a plus de cantonnier cassant les cailloux au bord des chemins pour boucher les trous en formation, ce marteau était toujours utilisé il y a peu dans ma région par les vignerons. En effet le labour (remplacé par certains avec une bonne dose de Roundup ………) faisant "remonter" les cailloux; les plus gros étaient souvent évacués au bord des vignes, mais les moyens cailloux qui risquaient d'être gênant pour les prochains labours, et pour le buttage des ceps avant l'hiver, étaient cassés avec ces marteaux équipés d'un manche permanent souvent renforcé d'un enroulement de fil de fer à la sortie de l'œil. Les cailloux sont conservés dans les vignes car ils ont une fonction d'accumulateur restituant la nuit la chaleur du soleil de la journée, de plus dans les terres argileuses ils limitent un peu le tassement ce qui améliore la perméabilité à l'eau de pluie."
Les grandes dalles romaines, carrées ou polygonales, sont devenues au fil des siècles des petits carrés de 8 x 8, 10 x 10 cm, d'épaisseur variable…, plus faciles à transporter et à poser. La pierre utilisée est la pierre locale, le bois, le marbre, mais surtout le grès. Pour débiter cette pierre, le carrier utilise la smille, déjà présentée chez le carrier, et la masse-couperet.
Masse-couperet |
Un autre marteau est utilisé par le paveur pour tailler, mettre à la bonne dimension le pavé au moment de la pose. Nous ne l'avons pas retrouvé dans les livres spécialisés. Toute information sera la bienvenue. Il est constitué de deux pannes opposées aux extrémités relativement épaisses, sans biseau (usure ?).
Marteau |
Mais le marteau emblématique du paveur reste ce marteau-taillant à tête relativement longue et panne plate, très large, renforcée par une nervure centrale. Il sert à ajuster la taille du pavé et à le mettre en place dans son lit de sable.
Marteau-taillant |
Marteau-taillant
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Marteau-taillant Pas-de-Calais ( ? ) Fer L 40 ; tête 14 x 3,5 x 3,5 panne 21 x 18 |
Lorsque les pavés sont en place, il faut aplanir le sol avec une masse cloutée, la dame ou demoiselle ou hie, que l'artisan fait tourner autour de lui.
Dame, damoiselle ou hie |
En réalité, cet outil, suivant sa taille, pouvait soit aplanir le pavage en place, soit damer la terre battue sur laquelle est coulé le sable.
Cette masse porte plusieurs noms : dame, du moyen néerlandais dam, digue, sans doute par analogie avec un massif tronconique en maçonnerie construit sur les digues pour en limiter l'accès ; hie, provenant également d'un mot néerlandais, heie. Dans son dictionnaire, Franklin parle du "hieur", artisan qui utilise la hie.
Comme dans d'autres dossiers, nous nous interrogeons sur l'appartenance d'un outil à tel ou tel métier. C'est le cas de cette pioche à deux taillants perpendiculaires. Dans son livre "les outils de métiers", D. Boucard présente un outil aux dimensions et formes générales (2 taillants perpendiculaires) similaires.
Pioche |
Telle est notre petite collection d'outils de cantonnier et de paveur. Elle est à l'image des outils dont devaient se contenter ses artisans qui ont apporté l'hygiène dans nos (grandes) villes, au Moyen-Âge et confort et sécurité pour les voyageurs à partir du XIXe siècle.
FIN
A.R.C.O.M.A. NOS OUTILS ANCIENS DE CANTONNIER ET DE PAVEUR